Anne Rouet : Itinéraire d’une voix de FIP.
De toutes les stations de radios, FIP est une des plus mythiques. Les mots prononcés par ces voix enchanteresses en ont fait fantasmer plus d’un.e. FIP nous apprenait aussi de nouvelles sonorités, élargissant notre horizon musical. En décembre 2020, les antennes FIP en région cessaient d’émettre sur la vois des ondes. Radio-Châteaubriant recevait Anne Rouet qui fut à l’origine, une des voix de FIP Nantes.
Bonjour, nous allons passer l’après-midi avec Anne Rouet, qui vient nous parler de radio. Alors Anne, dans ta vie professionnelle. Dans ta vie radiophonique, tu as mené combien d’interviews ?
Houla, j’ai pas compté, je n’ai pas compté ! Je suis pas restée très longtemps à Radio-France pour interviewer les gens. J’ai dû rester un an et demi, deux ans. Mais j’ai interviewé des gens tous les jours, tous les jours, du lundi au samedi et plusieurs heures dans la même matinée. Mais voilà, j’ai pas compté. Il y a des personnes qui m’ont marqué plus que d’autres. Que ce soit des chanteurs, des historiens, des écrivains, des sportifs, principalement des gens de la voile, du milieu de la voile.
Fin 2020, FIP Nantes s’arrêtait. Ça te dit quelque chose ?
Un peu…Moi , c’était pas FIP, c’était FILA, France-Inter, Loire Atlantique…
France Inter, Loire Atlantique. Mais qui est-ce qui s’en souvient ?
Je ne sais pas,… Moi, c’est sûr. Et quelques très anciens auditeurs, je ne dis pas vieux. J’ai dit anciens.
Ça a débuté quand alors ?
En 74,… en avril 74. Donc, FIP… FILA est né. Et c’était sur l’île Beaulieu, à Nantes,
Depuis 1970 Roland Dhordain avait mis en place FIP Paris ?
France-Inter Paris, qui était principalement destiné à encourager les personnes qui étaient dans les bouchons sur le périph en leur disant leur susurrant des jolies petites phrases sympas.
On en a un bel exemple dans » Elle court, Elle court la banlieue » avec Jacques Higelin…
Oui,…Absolument. Oui, c’est un beau film
Qui est à l’origine de FIP Nantes ?
Jean Garreto et Pierre Codou, qui étaient des gros créateurs sur France-Inter, de l’Oreille en coin, entre autres, de FIP qui étaient des garçons vraiment très créatifs et qui sortaient un peu de l’ordinaire. Parce qu’à l’époque, il n’y avait pas beaucoup de radios. Il y avait France-Inter, Bien sûr. Et puis France-Culture, France-Musique. Et puis les radios périphériques, c’est à dire RTL qui s’appelait pas encore RTL et Europe numéro 1.
Il y avait Codou et Garetto, et également une collaboratrice dont on ne parle jamais ?
Lucette Alléhaut… parce qu’on n’en parle jamais…C’est vraiment une personne que j’ai beaucoup appréciée et qui a su vraiment nous lancer, nous, ..les filles, les speakerines de FILA.
Tu débarques en 1974, dans le contexte 1974…
Oui, on n’était pas loin encore de 68. On était. C’était chouette. C’était une belle vie, même. Je ne suis pas…Je ne vais pas dire c’était mieux avant. Non, non, pas du tout. Mais on était libres. On était joyeux, surtout.
On peut dire joyeuses. Parce que c’était essentiellement des femmes.
Oui, mais les messieurs étaient joyeux aussi. On était que des que des filles. Mais on arrivait dans un monde d’hommes parce que la maison à Beaulieu, à Nantes, il y avait la télé. Il y avait Radio Pays de Loire et c’était ça doit être 99% d’hommes. A par les secrétaires, il n’y avait pas grand de femmes.
Qui est ce qui t’appelle pour parler dans le poste ?
J’avais postulé à l’époque, on postulait, on avait tout de suite un emploi, ou presque. Et puis là, j’ai eu la chance parce que c’était l’ORTF Nantes. J’ai eu la chance que FILA se crée à ce moment là. Donc, j’ai été convoquée à une audition. Et puis voilà.
L’audition se passait comment ?
On avait des textes avec des petits pièges.
Au départ, vous êtes combien de filles ?
Holà… à postuler ? Nous étions beaucoup…Après quand FILA, donc à démarré. On était 5/6, 6. Donc je peux même citer les noms. Y’avait Marie Drouin qui était notre notre chef d’antenne, en quelque sorte qui était la directrice en fait de Fila. Et puis, en speakerines, il y avait Anne Baugé, Marie-Paule Rival, Hélène Gaubert et moi même et Yasmine Labeyrie.
Mais dis-moi, ces noms, on les voyait aussi à la télé ?
Oui, oui, oui, on était quatre à être aussi speakerines télé, donc, pour présenter le journal régional. Et on était beaucoup, beaucoup vues puisque à l’époque, le journal régional était diffusé à 19 heures 20 sur les trois chaînes. La première, la deuxième et FR3. Tout le monde nous voyait.
Tu peux nous en dire plus sur la journée type d’une Fipette ?
Ça dépendait des vacations. Soit on faisait sept heures 13 heures à l’antenne, soit 13 heures/20 heures. Au tout début, après, c’était 19 heures. Ou bien on faisait une journée de 9 heures/ midi, 14 heures, 17 heures ou 18 heures, où là, on préparait nos textes. On les écrivait. Alors bien sûr, on faisait la recherche d’info aussi. On nous en envoyait. Il fallait aussi qu’on recherche. A l’époque, on n’avait pas Internet, pas d’ordinateur, on n’avait rien de tout ça. Et puis chaque information, on l’a rédigeait, on a préparé pour eux pour le lendemain ou surlendemain.
Alors, devant vous, une machine à écrire ?
Oui. Et puis un conducteur pour la liste des disques. Pour la liste des disques, oui, on recevait un conducteur tous les matins par porteur spécial à moto avec le titre du morceau, l’interprète, le compositeur, les références, bien sûr, des disques
Et l’heure pile à laquelle il allait être lancé ?
Non, c’est nous qui mettions les heures à la main. À chaque fois que l’on faisait un communiqué, qu’on disait qu’on donnait une info, on était. Je ne sais pas. Exposition à tel endroit. Annoncé à 9 heures. Voilà, vous étiez une radio d’accompagnement, d’accompagnement et de services. On faisait beaucoup d’information service local, les offres d’emploi, la météo, programme de cinéma, de théâtre, etc.
Donc les gens écrivaient pour les Fipettes ?
Ah oui, oui, on fait du courrier, des coups de fil aussi appelés beaucoup pour les références de disques, justement, dont je parlais tout de suite. C’était un prétexte. Les références? Non pas non, pas seulement. Pas seulement. Il n’y avait pas que des messieurs à nous appeler. C’est vrai qu’on a reçu des courriers parfois un peu olé olé. Mais des demandes en mariage? Non, pas spécialement. C’était même un peu plus. Un peu plus cru que ça. Je ne vois pas. C’est pas grave.
Nous sommes avec Anne Rouet qui a été une petite dizaine d’années à France-Inter Loire-Atlantique qui après être devenue FIP. On revient sur une journée à FIP. Sur l’ambiance qu’il y avait entre les filles. Qu’est ce qui te passionnait dans ce travail ? Tu n’étais pas qu’une voix ?
Non, surtout pas. Mais moi, j’ai toujours aimé la radio depuis toute petite, je voulais faire de la radio, je voulais être journaliste, grand reporter, j’sais pas. Il y avait une sorte de magie, une sorte de magie. Parce qu’en plus, il n’y avait personne sur la bande FM à l’époque. C’est venu un petit peu à partir de 81, puis après ça s’est développé. Énormément, ont été les seuls. Il y avait effectivement beaucoup de reconnaissance, mais pas que de la reconnaissance. Les gens étaient sympas. Il y avait de la joie, beaucoup de joie. On s’entendait très bien entre nous, toutes les filles.
Et puis, en plus, on n’était pas toutes seules parce que à Beaulieu, c’était la télé. C’était également la Radio Radio Pays de la Loire. On était bien vues parce qu’on était arrivées dans un milieu où il n’y avait que des journalistes et des techniciens, bien sûr. Et ils étaient ravis. Nous aussi, on rigolait beaucoup…
Et sur l’île Beaulieu, il n’y a pas grand chose. Il y a très peu de bâtiments. Il y a le centre commercial qui pousse. Le Conservatoire n’est pas là, non. Et il y a le bâtiment de FR3.
Y a la maison la M.A.N aussi, la maison de l’administration nouvelle qui est bourrée d’amiante, qu’on a fait sauter il y a quelques années. Oui, il y avait, il n’y avait rien que des friches et la maison de France 3, était seule au milieu des champs. Et voilà, c’est bon ça. Ça a été construit, ça a été inauguré en même temps, quasiment FILA, donc, cette maison qui hébergeait une radio Pays de Loire. Et puis la télé et au moment de l’inauguration de FILA, la télé régionale passée en couleur.
Je faisais partie de l’équipe, également des speakerines qui présentaient le journal, la météo de façon très rudimentaire. On avait un tableau en bois et puis on mettait des petits nuages et des petits soleils.
On téléphonait à Château-Bougon [ Nantes-Atlantique. NDLR.] ?
Château-Bougon, on les appelait beaucoup, nous aussi en radio, parce qu’on donnait la météo régulièrement. Et puis, on avait même instauré la météo marine. On avait parlé des marais aussi parce qu’on a profité du fait d’être pas loin de l’océan.
Tu m’as dit qu’on pourrait voir une émission où tu aller au travail en Solex ?
Oui, tout à fait. C’est vrai, c’est vrai. Oui, le matin et alors y’a un truc que j’adorais, c’était quand je passais sur ce qu’on appelle le pont LU. Là, à l’époque, il y avait encore la biscuiterie et l’odeur des petits beurre en train de cuire. C’était magnifique. Quand je passais là bas, je commençais à 7 heures le matin, donc je passais là bas. Je ne sais pas. Vers 6 heures et demie, sept heures moins le quart à merveille, ça me met en appétit.
Dès le matin, c’est un monde merveilleux que tu nous décris ?
Oui, mais pour moi, c’était ça. Peut être pas forcément pour tout le monde. C’est mon ressenti à moi. Moi, j’ai toujours adoré la radio. J’ai toujours adoré ce milieu.
Oui, parce que c’est une radio où la voix des animatrices de FILA ou de FIP accompagne les gens dans leur quotidien. Arrive jusque chez ces personnes, qu’elles soient à prendre un bain ou qu’elles soient en train de faire la cuisine, bien sûr. Vous faisiez partie de la vie des gens du quotidien, des gens.
Je pense d’ailleurs ont été diffusé dans quasiment tous les commerces de Nantes. Et puis, peut être aussi un peu du département, puisqu’on en émettait également sur Saint-Nazaire, La Baule. En principe, on émettait 50 km autour de Nantes. Il y avait beaucoup, beaucoup de commerces qui étaient sonorisées avec FILA. Parce que beaucoup de musiques sympas, des musiques qui n’étaient pas forcément habituelles. Puis nos voix… Effectivement.
On ne te reconnaissait pas dans la rue du monde, tu faisais de la radio, donc c’était juste une voix ?
Mais on faisait aussi de la télé.
D’accord, donc, tu faisais de la télé. Et donc, qu’est ce qui se passait quand tu me balader dans la rue ? On te demandait des autographes ?
Non, non, non, non, non, non, non, non, non. On m’a reconnue plusieurs fois.
Les gens étaient bienveillants ?
Oui, oui, tout à fait. Oui, parce, il n’y avait pas, ce qu’on connaît maintenant, la starisation entre guillemets. On était pas des stars, même si on était parfois traitées un peu comme ça. C’est vrai qu’on était reçues comme des princesses dans pas mal d’endroits, ce qui était fou.
Je suis partie au bout d’une dizaine d’années de FILA pour partir ensuite sur Radio France, etc. J’ai eu une petite parenthèse en radio privée et j’avais changé de nom, prénom. Et malgré ça, les gens se reconnaissaient. Mais aujourd’hui encore, je ne peux pas faire de farces au téléphone….C’est agaçant…
De 1974 à 1983, tu es sur FIP Nantes, qui s’appelle France Inter de Loire-Atlantique à l’époque. Et puis tu vas changer de département, tu vas changer de ville, tu vas rester dans le groupe Radio France pour rejoindre Radio Armorique.
Radio France Armorique, c’était Radio France, déjà, à Rennes.
Alors tu t’appelais ?
Annick Houville.
Voilà, on dit ça pour tous les gens qui se souviennent.
Oui, on ne sait jamais. Il y en a peut-être.
Et donc, tu arrives avenue Janvier, à Radio-France Armorique, et tu fais quoi ? Tu dis la météo ? L’horoscope ?
Non, en fait, je fais les directs tous les matins. On était en décrochage de France-Inter et à l’époque, c’était Eve Ruggieri qui terminait cette tranche de France-Inter. Elle terminait à 8h40. Et
donc je prenais le relais à ce moment-là jusqu’à midi et demi. Donc, j’avais plusieurs tranches. J’avais de l’info-service. J’avais de toute façon au moins un invité, un ou une invitée. Et puis
des rubriques en tous genres. Donc ça, c’était tous les matins de la semaine, du lundi au vendredi. Et le samedi, je faisais le direct également le matin, mais d’un lieu de l’un des trois départements qui étaient couverts par Radio-France Armorique, donc l’Ille et Vilaine, les Côtes d’Armor et le Morbihan.
C’est énorme à préparer. Tu étais toute seule pour préparer ton émission ?
Oui, oui, mais j’aime ça.
En face de toi, avec toi, tu avais un réalisateur ?
On avait un ingénieur du son qui était en studio. Sinon, il y avait un directeur d’antenne, bien sûr qui avait quand même un regard sur ce qu’on faisait, mais sans plus.
Et ça, six jours de la semaine, faut tenir, c’était du sport ?
J’étais jeune. Non, mais quand on aime, on ne compte pas. Après l’après-midi, de toute façon, je restais bien sûr à la radio et là, je préparais mon conducteur parce que du coup, c’était moi qui choisissais ma musique. Je préparais bien sûr mes interviews, mes rendez-vous. En général, ça se préparait même largement en amont. Parce que si je recevais un écrivain ou un chanteur, il fallait que je sois un petit peu au courant quand même de ce qu’il venait nous présenter.
À la fois, c’était quelque chose qui te permettait toi-même de te faire une propre culture ?
Oui, bien sûr. Ah oui, j’ai découvert des tas de choses, en particulier en musique, bien sûr.
Au départ, vous n’aviez, hormis ce mois de programmation pour poser la voix, vous n’aviez aucune formation. Tu voyais qui était Annie Cordy ou Joe Dassin, mais c’est pas tellement Annie Cordy qui passait sur FIP, c’est plutôt Bill Evans, c’est plutôt Charlie Parker. Ou, s’il faut faire la quête, j’arrête. C’était quand même plus Billy Holiday que…
Bien sûr. Oui, mais au départ, je pense qu’on était quand même toutes plus ou moins passionnées. Et on avait déjà quelques connaissances. Je pense à Hélène, dont le mari était un fana de jazz, qui savait écouter un morceau et nous disait qui était à la batterie, qui était à la contrebasse. Moi, personnellement, j’ai toujours été bercée, à écouter la radio tout le temps, tout le temps, tout le temps.
C’est un tout autre travail que ce que tu faisais à FIP ?
Oui, bien sûr, c’était beaucoup plus étoffé. On va dire beaucoup, mais beaucoup plus riche aussi. Moi, j’aime bien la rencontre avec les gens. C’était du direct ça. J’adore le direct. Et puis la radio en général, pour moi, c’est quelque chose de génial parce que chaque personne qui écoute la radio peut voir, entendre, les choses différemment. Et moi, c’est ce que j’aime en radio, c’est qu’on peut imaginer des choses en écoutant, simplement, ce n’est pas servi tout cuit comme à la télé.
Sur ces émissions-là, il y a une haute fidélité, je ne parle pas de la qualité du son, mais une haute fidélité des auditeurs et des auditrices qui sont attachés à telle animatrice, ou tel animateur ? Le matin sur les radios régionales de Radio-France, ce sont des gens qui sont soit au boulot, soit à la maison, qui écoutent. Et c’est vraiment encore de l’accompagnement.
Oui, oui, aussi, bien sûr. Bien sûr.
Alors ? Tes belles rencontres parmi tes invités ?
Il y en a tellement. J’ai adoré rencontrer certains chanteurs, certaines chanteuses comme Isabelle Mayereau, on en parlait en préparant l’émission, mais bien d’autres. Je me souviens de Jesse Garon, qui était complètement fou,…Enfin fou dans la mesure où il était tout excité, je me souviens qu’un jour en télé, il a craqué son pantalon en essayant de faire un grand écart…En fait, c’était trop drôle et plein d’autres.
J’ai rencontré Jean-Patrick Capdevielle, qui était vraiment adorable. Il y a eu des rencontres avec des écrivains comme Claude Michelet, comme Pierre et Maryvonne Miquel, qui étaient tous les deux écrivains historiens.
Et puis, dans le milieu complètement différent de la voile, des sportifs, Éric Tabarly, Olivier de Kersauson et beaucoup d’autres. Parce que j’aimais beaucoup…je suivais beaucoup les courses à la voile.
Tu as toujours aimé l’océan ?
Ah ouais, ça je ne peux pas m’en passer.
Oui, aujourd’hui, tu ne peux pas te passer de l’océan. Il faut que tu ailles au moins une fois la semaine au bord de mer ?
Pas toujours parce que je ne pas forcément toujours l’occasion, mais je sais que je peux y aller. Ça, c’est important. Je sais, le matin, je me lève, si j’ai envie de voir l’océan, j’y vais, je peux du moins.
Aujourd’hui, tu résides en Loire-Atlantique, quelque part à une demi heure de la mer.
Tu es dans le dans le plus intérieur de la continuité de la grande Brière et la presqu’île guérandaise. Tu es sur le bord de L’Isac…
Ah oui, parce que les rivières, c’est pareil. J’ai besoin d’eau.
On en reparlera un autre jour sur un très beau texte que tu as écrit à propos de l’eau.
Aujourd’hui, tu fais quoi ?
Alors, aujourd’hui, je suis officiellement retraitée. Ça me fait rire, parce que j’ai horreur de ce mot et je suis correspondante pour le journal de Ouest-France. Je travaille aussi un petit peu
de temps en temps pour des instituts de sondage. Faire des audits, des choses comme ça.
Tu as bossé un peu pour l’Éclaireur ?
Oui, aussi pour L’Écho de la Presqu’ile aussi. Ça fait une dizaine d’années maintenant que je fais ce boulot de correspondante.
Ça consiste en quoi d’être correspondante de presse ?
C’est se tenir au courant de tout ce qui se passe dans la commune. Et puis faire des petits reportages et les écrire. Les photographier. Envoyer tout ça au journal.
Te faire engueuler par le maire ? Ou te faire féliciter…
Oui, j’ai la chance, moi, d’être plutôt félicitée parce que je suis toujours un peu sur le coup, entre guillemets. Et j’essaie de parler, de rendre service à tous les gens qui font plein de choses dans ma commune. Donc, évidemment, ils sont très contents.
Mais on peut saluer les correspondants de presse, parce qu’on peut dire qu’ils n’ont pas beaucoup de reconnaissance…
C’est clair. On travaille beaucoup pour… ce n’est pas pour l’argent, c’est pas pour l’argent et puis pour le statut… Je suis effectivement retraitée maintenant, mais il y a des personnes beaucoup plus jeunes qui font que cela. Et c’est compliqué parce qu’on n’est pas salarié. On ne cotise pas. On n’a pas de couverture sociale, on n’a rien. Et en plus, très peu de reconnaissance effectivement.
Cette information que FIP, France-Inter Loire-Atlantique, cesse depuis vendredi dernier, ça te fait quoi ?
Je suis très triste parce que, arrêter une radio, comme arrêter d’ailleurs un journal, c’est terrible. C’est une déchirure, c’est une déchirure. Même si c’est devenu FIP, c’est plus tout à fait la même atmosphère. Mais c’est toujours terrible d’arrêter une radio.
Tu aurais voulu du changement dans cette radio-là ? Tu penses qu’une radio telle que FIP, ne s’est pas renouvelée ?
C’est possible. C’est la raison pour laquelle j’en suis partie au bout de 10 ans. Oui, mais bon. Est-ce que j’avais raison ? Est-ce que j’avais tort ? Je n’en sais rien. J’avais besoin d’évoluer et de faire autre chose.
Oui, parce que toi, tu y était à la grande époque où il y avait comme programmateur Julien Delli Fiori, il y a eu Clémentine Célarié…C’était quand même des modèles ?
Complètement, complètement.
Aujourd’hui, tu écoutes la radio ?
Oui et non. J’écoute les infos sur plusieurs stations quelles qu’elles soient. Mais non, ce n’est plus du tout…ce n’est plus franchement pareil.
Parce qu’il faut dire qu’à l’époque les gens étaient d’une fidélité incroyable. On appuyait sur un seul bouton…
On appuyait pas on le tournait (rires)
Oui, bien sûr, mais c’était On/Off. Oui, moi, je me rappelle d’un endroit où j’étais, où j’étais juste On/Off et c’était bloqué sur France-Inter Loire-Atlantique. Il y a une chose qu’on n’a pas précisé, c’est qu’il y avait des journaux d’information…vas-y développe, là-dessus…
C’est des journaux faits par Paris. En fait, on avait une petite intervention des journalistes de Paris. On avait un petit ding ding sur une musique et là, on savait qu’on avait intérêt à se taire.
C’était à Paris de prendre la main et de faire un petit point, un petit flash info vraiment très court.
Aujourd’hui, depuis quelques années, tu t’es mise à écrire, tu écrivais sans doute avant ?
Oui, j’ai toujours écrit.
Tu t’es mise à écrire et à publier ?
Publier un tout petit peu, un tout petit peu parce que le monde de l’édition est très, très compliqué. Donc, évidemment, actuellement, on trouve sur Internet pléthore de maisons d’édition qui n’en sont pas vraiment, pour lesquelles, souvent, il faut payer ou même acheter son livre une fois qu’il est imprimé. Donc, pour le moment, j’ai beaucoup de choses écrites et très peu de publiées.
Donc, il y a quelques années, tu as publié un livre auquel tu es attaché, qui s’appelle ?
Le rêve de Julien.
Donc, on conseille à tout le monde.
C’est gentil, merci. Ben, je crois que c’est un peu une ode à ce que j’aime, à la nature et à la Loire, à l’estuaire de la Loire, la Loire que j’ai suivi depuis, depuis toujours…
Depuis ta naissance ? Parce que tu es une Tourangelle ?
Oui, oui, je suis née à Tours, entre la Loire et le Cher, mais j’ai descendu la Loire petit à petit.
Donc j’ai fait une infidélité quand je suis allée à Rennes. Mais j’aime bien la Vilaine aussi.
Non, mais là, tu vas ranimer des guerres…entre Nantes et Rennes…
Je vais me faire mal voir, mais c’est pas grave.
Entre Nantes et Rennes, oui je sais bien. Moi, j’aime les deux. Voilà !
Nous sommes toujours sur Radio Châteaubriant. Nous n’avons aucun avis bien sûr !
Écrire, c’est devenu pour toi une nécessité ? On peut écrire dans la douleur ?
Ah oui, bien sûr, on peut écrire, on peut composer, je pense. Je pense que toute expression artistique est liée à la douleur. Je pense qu’on exprime mieux les choses quand on souffre, quand on est heureux. Quand on est heureux, bah, que dire ? On est heureux ?
Mais si on souffre tellement, on n’est plus en capacité d’écrire ?
Si, moi, si, si, si. Et au contraire, même je pense que ça fait du bien, ça fait du bien de l’écrire, de se débarrasser quelque part.
Le rêve de Julien, c’est un livre lumineux, c’est différent.
Oui, ce sont les lumières de l’estuaire de la Loire, la nature de tout ce que ça comporte.
Aujourd’hui, tu as un projet que tu mènes déjà depuis un bout de temps. Tu…j’allais dire, tu écris presque à quatre mains, mais tu écris avec qui ?
J’écris à deux pattes et deux mains.
Tu écris à deux pattes et deux mains, tu nous expliques ?
J’ai un chat, un bon vieux chat. Ça fait onze ans qu’on vit ensemble. On partage tout ensemble. Il a été sympa, mais là, j’ai décidé que c’était lui qui écrivait notre journal. Du coup, le sien et surtout le mien quand même. C’est un prétexte, mais c’est rigolo, c’est amusant à faire.
C’est pas par hasard si un chat, on appelle ça un greffier. Donc ça écrit bien les chats ?
Ah oui, oui, c’est franc.
C’est quoi ? C’est court, c’est incisif ? Il écrit tous les jours, le chat ?
Il essaye. Ouais, ouais, ouais. Parce qu’il lui arrive souvent des trucs quand même. Il n’est pas toujours d’accord avec son humaine.
Il raconte quoi, il raconte la journée de l’humaine ?
Pas que ! Il raconte aussi la sienne. Parce qu’elle lui casse les pieds, quoi. Et il aimerait bien être tranquille quoi ! Il faut toujours qu’elle le titille et qu’elle lui dise de sortir, qu’elle lui dise certaines choses, qu’elle le dispute parce qu’il n’a pas mangé sa gamelle, parce que Monsieur fait le difficile, mais il a des opinions.
Sur quoi ? La politique internationale ? Sur le temps qu’il fait ?
Sur le temps qui passe, aussi.
Le temps qui passe ?
Oui, je crois qu’il a beaucoup…Il est très attentif et je pense qu’il entend beaucoup son humaine. Il l’entend penser.
Ça l’inquiète le chat, le temps qui passe ?
Non, je ne crois pas. Je ne crois.
Parce que moi, je le vois avec plein de sourires quand même. Donc, ces textes-là, on va les voir bientôt ?
Alors ça, je ne sais pas, ce sera la surprise, s’il y en a d’autres. J’ai écrit d’autres choses aussi pendant le premier confinement. Mais bon, tout le monde a écrit pendant le premier confinement, donc c’est compliqué. Et si on n’est pas très, très connu, si on n’est pas justement une star de téléréalité, votre livre, il passe pas.
Et un titre de travail ? Tu peux nous en dire plus ?
Le Journal de Harry et Juliette.
Le journal de Harry et Juliette, ça fera peut-être un podcast pour Radio Châteaubriant ?
Qui sait ? Pourquoi pas ?
Anne Rouet, je te remercie.